BANGKOK

Bangkok... Un nom exotique, qui rime avec choc ! et où je traîne mes guêtres en ce début novembre le long de ses trottoirs cassés et enfumés, entre jardins exotiques et longues avenues à étages...

Choc des températures tout d'abord, où l'on flirte de jour comme de nuit allègrement avec les trente cinq degrés... Choc des odeurs ensuite, en arpentant les rues et les boulevards surplombés des voies des métros aériens... Rues où se mèlent les senteurs des petites échoppes-restaurants qui campent au bord des trottoirs, aux effluves de poubelles exhalant de chaleur... le tout brassé en des nuages de gaz carbonique des embouteillages sans fin de cette ville folle ! Choc de ces contrastes entre la pauvreté au sol et les hauts buildings d'affaires qui pointent au ciel... les grooms enlivrées des hôtels palaces à l'air conditionné et les mendiants suants en guenilles dehors... Choc aussi de cette magnifique spiritualité qui anime chaque thaïlandais, les riches comme les pauvres, et le commerce qui en est fait... à l'image de ses Bouddhas emballés dans du plastique transparent. Choc de moi pour finir, pas à ma place, touriste voyeur qui se promène dans sa bulle...

Alors je marche, les yeux écarquillés et les narines resserrées autant que possible (!) sur les longues avenues bruyantes qui mènent mes pas au gré de mes envies... Je prends cette ruelle-ci, à gauche, puis celle-là... pour aboutir dans une plus grande... Je m'arrête dans ce petit restaurant sombre où piaillent des enfants et des femmes et où l'on me sert un sublime curry de poulet au coco... et un soda frais. Sous ma chaise, pointe le museau d'une minette qui cherche pitance pour ses petits... Deux beaux yeux bleus qui me scrutent et m'attendent... Mais le curry est trop fort minette!... Elle va chercher ailleurs... Et moi aussi... Petite pause en mes déambulations de touriste sans but... Je ressors dans la fournaise de cette rue, reprends ma marche. Puis une jolie thaïlandaise dont c'est le métier, me propose un souriant "Thaï massage sir?"... pour 450 baht... (9 euros). Je me laisse tenter et la suis dans la boutique où ses collègues me sourient à leur tour.

Une heure à laisser ces jolies mains expertes me délivrer des tensions accumulées aux muscles de mes jambes lors de mes longues marches, de mon dos, de mon cou... relaxation au doux souffle d'un ventilateur de plafond qui diffuse une douce fraîcheur sur ma peau huilée et parfumée. Heure qui passe bien vite, comme dans un demi sommeil... La jeune femme m'offre ensuite un thé pour clôturer la séance. Un thé bien chaud mais pas sucré que je bois cependant avec un réel plaisir... avant de me laisser à nouveau happer par le flot poussièreux de la Silom road et des grandes avenues. Détendu. Souriant, moi aussi... pour une fois.

Je ne sais ensuite par quel itinéraire, mais je me retrouve soudain bien loin du centre, le long d'une voie ferrée, sous un échangeur d'autoroute... en un lieu étrange. La voie semble en activité vu la brillance de ses rails, mais, au loin, j'aperçois déambuler des gens. Je vois des baraques le long des voies, des cabanes faites de planches et de tonneaux... C'est une ville dans la ville. Un village de voie ferrée, fait de brics et de brocs... J'hésite un peu, mais m'y engage... La voie ferrée en est la rue principale!... et je m'avance à pas lents, rhythmés à la cadence des traverses de bois qui raccourcissent mes pas, sur cette voie étrange... Je me retourne de temps en temps pour vérifier qu'aucun train ne vient... et je croise des familles, des enfants, des femmes en train de discuter... On me regarde passer, presque amusé, mais sans hostilité. J'engage même la conversation par un "Sawadi kap" (bonjour en thaïlandais) souriant auquel on me répond toujours... Un peu plus loin, je suis même invité à une tablée de trois personnes!... un homme d'un certain âge, et deux femmes, attablés autour d'un met inconnu et fort peu tentant. Je décline l'invitation à manger, mais accepte un Pepsi chaud pour ne pas vexer... Un parasol vert et bleu abrite des rayons du soleil une maison aux esprits qui protège la cabane... On rit, on ne se comprend pas... mais ce n'est pas grave... C'est une courte mais chaleureuse journée à Bangkok, que je garderai en mémoire pour mes froides soirées parisiennes, mon long hiver à venir...

(à suivre...)

(Bangkok, Novembre 2007)