CANADA TOUR 2008

Dans les longues avenues d'Ottawa, je parcourre les trottoirs enneigés en ce début d'hiver. Col relevé et écharpe enroulée autour du cou, je me calfeutre comme je peux en ma marche glacée...

Voilà enfin un moment pour moi, un moment à me consacrer à ma solitude au glacial vent de cette ville où je joue ce soir. Quelques heures loin du tumulte de mes amis anglais, musiciens avec qui je voyage lors de cette tournée, loin des rires et des repas, des rencontres avec des inconnus qui me font griffouiller mon nom à la fin des concerts sur des posters colorés. Quelques instants loin des décibels et des soleils éblouissants mais factices. Quelques précieux moments où je vais où je veux, en pensées comme en pas, pour me promener un peu, seul, dans ces rues inconnues, sous le crachin neigeux de cette fin de jour.

La ville se congèle. Mes pas se rapetissent. Je regarde la neige qui crisse sous mes pieds. Je repense à ces journées, à ces nuits de musique dans le froid canadien. La tournée se termine bientôt. Il va nous falloir rentrer, en notre moîte Europe, là où l'air est plus doux, les trottoirs moins blancs. Là où la vie va reprendre son cours quotidien, loin des horizons étranges qui motivent mes marches.

Je repenserai alors à ces rues claires de neige et parfois de soleil... à ces journées de routes défilantes entre deux villes, à ces repas dans ces restos de hasard sur la route, ces clubs de fin de soirées où coule la bière pour délasser le stress et la fatigue... à ces nuits de musique et à ces milliers de visages, chaque soir, qui me souriaient... mes saxophones dorés scintillants des lumières colorées de la scène... A mes copains du groupe, leurs blagues de potaches, nos batailles de boules de neige nocturnes, grands enfants qui jouent... qui jouent de la musique aussi...  Je comprends d'ailleurs mieux le terme "jouer" à présent... Je suis un "joueur" de saxophone, voilà tout. Je passe ma vie à jouer, insouciant, à rêver sans jamais trop penser aux lendemains... à faire mon chemin le nez au vent... sans autre ambition que de me sentir vivant... que de capter des instants de joie et de douceur, immortaliser des moments avec mon Nikon tout comme avec mon coeur. Je ne sais rien construire, je ne fais que planer aux brises du destin. Est-ce bien? Est-ce mal? Je ne le sais toujours pas. Mais tout cela me semble si irréel...

Voyages au gré des chances proposées... dont il ne reste rien, sinon quelques images et quelques souvenirs. Ephémères instants comme le sont les notes de musique que je pousse toujours, qui résonnent un peu, et puis disparaîssent à jamais quand la salle se rallume.